"L’aléatoire est la règle du jeu, l’objectif est de libérer la sculpture des contraintes de la composition, d’un ordre idéal." B. Venet

En ville, rares sont les itinéraires volontairement indéterminés qui permettent la flânerie. Or Bernar Venet installe au milieu de la place de Bordeaux une Ligne indéterminée qui ne cherche pas le dialogue avec le site environnant : une ligne à l’aspect brut, peinte en acier noir, dans l’espace, comme la matérialisation d’un geste spontané, celui de la main de l’artiste esquissant un croquis abstrait. Ce "gribouillage, ce tracé rudimentaire à l’apparence barbare"¹ prend la forme d’une spirale en acier aux torsions aléatoires et spontanées, comme si cette ligne possédait son propre libre-arbitre. Par une action répétée de torsion qui prouve la détermination de l'artiste de provoquer les limites plastiques de la matière, l'œuvre se révèle être indéterminée par le fait même de cette répétition. La ligne de Bernar Venet aussi s'achève mais elle suggère sa continuation dans l'espace. Ainsi, toute l'action déterminée de l'artiste a consisté ici à créer une œuvre indéterminée qui, en la contournant, se dérobe à nos yeux, se tord et se noue sans réel dénouement. Le travail général de l'artiste s'appuie sur les écarts entre ce qui relève du développement chaotique ou du développement ordonné d'une chose.

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